Publié le 28.06.2022 à 10h55 par Arnaud Nicolas Mawel
L’ambassadeur de la République du Cameroun au Royaume du Maroc et doyen du groupe des ambassadeurs africains explique comment les migrants et les éléments des forces de maintien de l’ordre sont morts vendredi dernier. Au moins 27 migrants sont morts vendredi 24 juin 2022 au Maroc, alors qu’ils tentaient de forcer le passage pour se rendre en Europe. Les images et vidéos qui ont circulé sur les réseaux sociaux montrent bien au moins une vingtaine de personnes couchées étendues à même le sol et d’autres tenues et conduits par des éléments des forces de maintien de l’ordre. Au vu de ces images fixes et animées, beaucoup se demandent ce qui s’est passé.
Suite à cet incident, le ministère des affaires étrangères du Maroc en collaboration avec le ministère de l’Intérieur ont organisé une réunion d’information. Au sortir de cette rencontre, le diplomate camerounais a répondu aux questions de la presse locale. « Nous venons d’assister à une réunion d’information sur les événements qui se sont déroulés en Adore vendredi dernier et qui ont causé de nombreuses victimes tant du côté de ceux qui ont fait l’assaut que du côté des forces de maintien de l’ordre. On nous a montré les vidéos, les faits, et qui sont d’une violence inouïe », déclare l’ambassadeur.
Les migrants ont changé de mode opératoire Selon le doyen des ambassadeurs africains au Maroc, les migrants ont changé de stratégie. « C’est quelque chose à laquelle nous n’avons jamais assisté ici au Maroc. Par le passé, généralement ils nous ont habitués à l’attaque de ces barrières à la veille de Noël ou à la fête de Nouvel an. Mais cette année, ils ont choisi un vendredi nous ne savons pas pourquoi. Et ils ont changé le mode opératoire. Au lieu de s’attaquer à la barrière comme ils ont l’habitude de le faire, ils ont préféré s’attaquer même au passage de la frontière entre le Maroc et l’enclave de Melilla. Et c’est un passage étroit », rapporte-t-il.
« Nous condamnons ces manifestations »
S.E Mouhamadou Youssifou, ambassadeur du Cameroun au Royaume du Maroc
Et d’ajouter que les migrants étaient préparés pour affronter l’adversité des forces de maintien de l’ordre. « Ils ont attaqué, ils sont venus avec des battons, gourdins, des armes blanches, des couteaux, et prêts à en découdre avec les forces de maintien de l’ordre. Ce qui a inévitablement conduit à tout ce qu’on a eu par la suite des blessés et même des morts. Mais des morts en général parce qu’ils ont emprunté un couloir étroit et beaucoup sont morts du fait de la bousculade qui est advenue au niveau de ce passage-là », regrette-t-il.
« Nous condamnons avec la dernière énergie ces manifestations et nous disons que nous nous tenons constamment comme par le passé auprès des autorités marocaines pour essayer de juguler cette situation qui n’honore pas notre continent, qui n’honore pas ces migrants, qui n’honore pas leurs différents pays et qui n’honore pas le continent africain en général », déclare Mouhamadou Youssifou.
Pourtant l’Afrique a tout pour réussir « Je disais encore il y a quelques jours lorsqu’on célébrait la journée internationale de l’Afrique que l’Afrique est un continent béni. Il y a tout pour réussir sa vie ici en Afrique et notre jeunesse devrait comprendre cela. Il faut travailler. Il faut croire en notre continent, où il y a tout pour réussir. Vous pouvez faire de l’agriculture, vous pouvez apprendre un métier pour vous installer convenablement chez vous. Donc nous condamnons ce qui s’est passé et nous sommes prêts à accompagner le Royaume du Maroc pour trouver une solution pérenne ».
Origine des migrants Par ailleurs, le chef de la mission diplomatique du Cameroun au Maroc parle de la provenance des migrants et du réseau tissé pour favoriser leur mouvement. « La plupart des migrants viennent des pays en crise et ces filières sont alimentées parfois par des combattants issus de ces pays-là qui vivent sur le dos des migrants. C’est des réseaux de la traite humaine et donc ils perçoivent de l’argent et ils envoient ces migrants. C’est un réseau huilé bien encadré et on leur donne même des conseils sur comment opérer », précise-t-il.
« Nous sommes prêts pour créer une synergie d’action avec nos différents pays et avec ces pays qui sont également en crise. Nous sommes prêts à poser le problème au niveau de l’Union africaine et voir jusqu’où on peut juguler cette situation », a-t-il conclu.