Accusations du PDG contre le RPM : Ni sérénité ni retenue

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La réaction du secrétaire général adjoint du PDG est à la fois imprudente et irresponsable. Ne pas placer les «intérêts supérieurs (du Gabon) au second plan après ceux d’un pays tiers ou d’intérêts personnels obscurs» revient à militer pour des élections transparentes.

En se demandant si Alexandre Barro-Chambrier a «obtenu des assurances de la part de soutiens puissants» et s’«il sera soutenu, même militairement, au moment de la proclamation des résultats de l’élection», Michel-Philippe Nzé prend la responsabilité d’ouvrir une crise diplomatique. © Gabonreview

 

«On peut ainsi dire qu’il se prépare à semer la mort et la désolation (…) au cas où les résultats électoraux ne seraient pas en sa faveur.» Se risquant à une exégèse des propos du président du Rassemblement pour la patrie et la modernité (RPM), le secrétaire général adjoint du Parti démocratique gabonais (PDG) a forcé le trait. Loin de tout parti pris, il faut le relever : l’usage de la violence à des fins de conquête ou de conservation du pouvoir est caractéristique d’un camp précis. En 2009 comme en 2016, l’annonce de la victoire d’Ali Bongo entraîna des émeutes durement réprimées. Dans le premiers cas, le gouvernement reconnut trois morts quand l’opposition parlait de 15, en sus de «311 détenus dont une vingtaine de femmes.» Dans le second, les pouvoirs publics parlèrent d’abord de cinq morts, avant d’avancer le chiffre trois puis de faire état de «800 à 1 100 arrestations.» Si la presse internationale dressa un autre bilan, l’opposition publia une liste de 28 morts formellement identifiés.

Une frontière de 1 903 kilomètres

Comme tout citoyen, Michel-Philippe Nzé a vécu ces moments. Comme tout le monde, il doit s’en souvenir. Ses fonctions l’obligent-ils à une lecture partiale des faits ? Il ne doit pour autant manquer ni de sérénité ni de retenue. De sa part, deux idées laissent croire à une dangereuse surenchère. En se demandant si Alexandre Barro-Chambrier a «obtenu des assurances de la part de soutiens puissants» et s’«il sera soutenu, même militairement, au moment de la proclamation des résultats de l’élection», il prend la responsabilité d’ouvrir une crise diplomatique. Les «alliances matrimoniales de l’intéressé» ou ses «accointances familiales extérieures» ? Leur évocation permet de deviner la puissance étrangère ainsi soupçonnée : un voisin avec lequel notre pays partage une frontière de 1 903 kilomètres. Pour cette seule raison, la réaction du secrétaire général adjoint du PDG est à la fois imprudente et irresponsable.

Croyant nuire à Alexandre Barro-Chambrier, Michel-Philippe Nzé se demande s’il y a une «garantie que ce candidat, président devenu, (serve) exclusivement les intérêts du Gabon», ajoutant : «Dans ce type d’affaires, des engagements réciproques (…) sont pris et doivent être respectés scrupuleusement sous peine de représailles.» Autrement dit, le secrétaire général adjoint du PDG accuse le président du RPM d’être au service d’intérêts étrangers. A l’approche de la prochaine présidentielle, il le met en garde contre un éventuel contrecoup, «la mort et la désolation» pouvant être semées en cas de manquement à la parole donnée. Compte tenu de leur gravité, on a envie de lui demander d’apporter la preuve de ses dires. Après tout, le 30 août 2009, un proche d’André Mba Obame affirmait être au fait d’un projet de «déstabilisation du pays», prétendant avoir participé à des rencontres avec des responsables de certains pays. Plus décennie plus loin, personne n’y croit.

À la Francis Salah Ngoua Beaud

Troisième personnalité du PDG, Michel-Philippe Nzé ne peut se lancer dans des accusations à la Francis Salah Ngoua Beaud. Sa parole étant censée engager l’ensemble de son parti, il ne peut en user juste pour faire de l’esbroufe ou construire des intrigues. Au risque de se donner l’image d’un apprenti-sorcier, il gagnerait à la soupeser, à en rester maître. S’il dispose d’un cabinet, il doit surveiller les publications faites en son nom, sous peine d’être accusé de jouer avec le feu. Après tout, le PDG contrôle le Parlement et le gouvernement. De ce point de vue, il est censé avoir une influence sur la marche du pays, y compris en matière diplomatique. D’où la nécessité pour son porte-parole de tourner la langue sept fois avant de s’exprimer.

Au demeurant, le PDG doit construire une communication plus responsable. Pour cela, il doit commencer par tourner le dos à la politicaillerie et s’inscrire dans la politique. En clair, il doit souscrire au principe d’alternance Or, sur ce point, il est resté fidèle à lui-même : déterminé à s’accrocher au pouvoir par tous les moyens, y compris la fraude, la violation de la loi, l’instrumentalisation de la justice et la violence armée… Ne lui en déplaise, ne pas placer les «intérêts supérieurs (du Gabon) au second plan après ceux d’un pays tiers ou d’intérêts personnels obscurs» revient à militer pour des élections transparentes, inclusives et crédibles. Ne pas l’admettre c’est se préparer à «semer la mort et la désolation.»

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